Fiche pratique n° 2 : Les conclusions

Observations pratiques établies par :

Maître Marie-Pierre VEDEL-SALLES, Maître Harold HERMAN,

Maître Oriane DONTOT, Maître Eugénie CRIQUILLON,

Maître Blandine DAVID, Maître François PIAULT

et Maître Caroline REGNIER AUBERT,

Avocats spécialistes en procédure d’appel, membres de l’association de l’ASPRA FRANCE

Fiche pratique n° 2 : Les conclusions

Nota : il est renvoyé aux fiches pratiques n°3 et 4 concernant les délais pour conclure en matière de procédure à bref délai et en circuit ordinaire

Ce qui change :

  • La possibilité de compléter, retrancher ou rectifier, dans le dispositif de ses premières conclusions, les chefs du dispositif du jugement critiqués dans la déclaration d’appel.  
  • L’obligation de préciser dans le dispositif des conclusions les chefs de jugement expressément critiqués

CPC, art. 915-2 et 954

  • La création du droit à l’erreur
Art 910-4 A peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures. Néanmoins, et sans préjudice de l’alinéa 2 de l’article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.Art 915-2   L’appelant principal peut compléter, retrancher ou rectifier, dans le dispositif de ses premières conclusions remises dans les délais prévus au premier alinéa de l’article 906-2 et à l’article 908, les chefs du dispositif du jugement critiqués mentionnés dans la déclaration d’appel. La cour est saisie des chefs du dispositif du jugement ainsi déterminés et de ceux qui en dépendent.   A peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 906-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

  Néanmoins, et sans préjudice de l’article 914-3, demeurent recevables, dans les limites des chefs du dispositif du jugement critiqués et de ceux qui en dépendent, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

L’alinéa 1 est créé.

On l’a vu, il s’agit de la modification phare de la réforme qui répond au souci de simplification : l’appelant dispose d’un droit à l’erreur concernant l’oubli ou l’erreur de mention d’un chef de jugement critiqué dans sa déclaration d’appel dont la rectification ne passera plus nécessairement par la régularisation d’une nouvelle déclaration d’appel. 

Il pourra, dans son délai pour conclure en matière de procédure à bref délai comme en procédure ordinaire, compléter, retrancher ou rectifier des chefs de jugement critiquer dans le dispositif de ses premières écritures et ce, même si son délai pour former appel est expiré.

Il faut bien avoir à l’esprit que cet assouplissement procédural, qui contribuera à alléger les greffes, imposera à l’appelant de préciser dans le dispositif de ses conclusions les chefs de jugement qu’il critique y compris lorsqu’ils seront rigoureusement identiques à ceux visés dans la déclaration d’appel, ce que la Cour de Cassation avait jusqu’à présent jugé inutile (Civ. 2ème., 3 mars 2022, N° 20-20.017).

C’est désormais la déclaration d’appel et le dispositif des conclusions qui opèrent l’effet dévolutif. [1]

  • Le formalisme (excessif ?) des conclusions
Art 954 Les conclusions d’appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l’article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé. Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte. La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion. Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées. La partie qui conclut à l’infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu’elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance. La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.  Art 954 Les conclusions d’appel contiennent, en en-tête, les indications prévues aux à l’article 961  deuxième à quatrième alinéas de l’article 960. Elles doivent formuler formulent expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé. Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’ et un dispositif dans lequel l’appelant indique s’il demande l’annulation ou l’infirmation du jugement et énonce, s’il conclut à l’infirmation, les chefs du dispositif du jugement critiqués, et dans lequel l’ensemble des parties récapitulent leurs prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures conclusions sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte. La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion. Les parties doivent reprendre reprennent, dans leurs dernières écritures conclusions, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées. La partie qui conclut à l’infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu’elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance. La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.  

L’entête des conclusions et les éléments relatifs à l’identification des parties prescrits à peine d’irrecevabilitéLe renvoi aux dispositions de l’article 961 est supprimé et remplacé par un renvoi aux 2ème et 4 alinéas de l’article 960 du CPC dont la rédaction demeure intacte[2]. Cette modification ne change rien dès lors que l’article 961 renvoyait déjà aux dispositions de l’article 960.

Il faudra donc toujours veiller dans l’entête des conclusions à rappeler les éléments classiques d’identification des parties à savoir pour :

  • Une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance
  • Une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement.

L’absence de ces éléments d’identification est toujours sanctionnée par une irrecevabilité qui peut être régularisée jusqu’au prononcé de l’ordonnance de clôture ou en l’absence de mise en état jusqu’à l’ouverture des débats 

Le dispositif des conclusions

Le contenu du dispositif  – Le principal changement opéré se situe à l’alinéa 2 de l’article 954 et vise l’appelant au sens large comme il le sera précisé ci-après. 

Ainsi, celui-ci devra :

  • Mentionner dans le dispositif de ses conclusions s’il demande l’annulation ou l’infirmation de la décision attaquée : le texte consacre ainsi une jurisprudence bien établie.

L’on rappellera en effet que, jusqu’à présent, l’absence de mention dans le dispositif des conclusions de la demande d’annulation ou d’infirmation du jugement déféré, mention qui n’est pas expressément prévue à l’article 954 du CPC, entraine :

  • Soit la nécessaire confirmation par la Cour du jugement entrepris (Civ 2ème 17/09/2020 pourvoi 18-23.626)
  • Soit la caducité de l’appel (Civ 2ème 04/11/2021 n° 20-15.757)

Si ces sanctions ne sont pas expressément reprises par les nouvelles dispositions de l’article 954 du CPC, la jurisprudence de la Cour de Cassation demeure, sans véritablement doute possible, applicable.

  • S’il demande l’infirmation, l’appelant devra désormais rappeler dans son dispositif les chefs de la décision critiqués. Il s’agit d’une obligation nouvelle.

La jurisprudence actuelle de la Cour de Cassation, qui juge que l’absence de mention des chefs de la décision attaquée n’opère pas effet dévolutif, peut être transposée au dispositif des conclusions qui omet de reprendre, en tout ou partie, ces mêmes chefs.

Ces obligations concernent aussi bien l’appelant que l’intimé qui forme appel incident

Seul l’appelant est visé par le texte. Cependant, la Cour de Cassation traitant exactement de la même manière l’appelant principal et l’appelant incident, l’intimé qui forme appel incident devra respecter ce formalisme.

Exemple de rédaction de dispositif

Situation de l’appelantSituation de l’intimé qui forme appel incident
  Déclarer X recevable et bien fondé en son appel du jugement rendu le XXX par XXXX   Y faisant droit :   Infirmer la décision entreprise en ce qu’elle :       (lister les chefs de dispositif du jugement que l’on entend critiquer)   Statuant à nouveau de ces chefs :   Enumérer les prétentions        Déclarer X (l’appelant) mal fondé en son appel du jugement rendu le XXX par   Déclarer en revanche bien fondé Y (l’intimé) en son appel incident   Y faisant droit :   Infirmer la décision entreprise en ce qu’elle :       (lister les chefs de dispositif du jugement que l’on entend critiquer)   Statuant à nouveau de ces chefs :   Enumérer les prétentions     Pour le surplus   Confirmer la décision en ses dispositions non contraires aux présentes   Débouter X (l’appelant) de toutes ses demandes fins conclusions plus amples ou contraires  

La portée du dispositif – Le décret n’a pas modifié la portée du dispositif :

  • Le dispositif fixe les limites du litige :  toute prétention qui n’est pas reprise dans le dispositif des conclusions des parties ne peut être examinée par la Cour.
  • La mention des prétentions dans le dispositif des conclusions ne suffit pas : pour que la Cour les examine, encore faut-il, que les moyens au soutien de ces prétentions soient développés dans la discussion des conclusions

[1] Il est renvoyé sur ce point à la fiche n°1 sur la déclaration d’appel

[2] L’article 960 du CPC relatif dispose :

La constitution d’avocat par l’intimé ou par toute personne qui devient partie en cours d’instance est dénoncée aux autres parties par notification entre avocats.

Cet acte indique :

a) Si la partie est une personne physique, ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;

b) S’il s’agit d’une personne morale, sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement.

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