Fiche pratique n°1 – La déclaration d’Appel

Observations pratiques établies par :

Maître Marie-Pierre VEDEL-SALLES,

Maître Harold HERMAN,

Maître Oriane DONTOT,

Maître Eugénie CRIQUILLON,

Maître Blandine DAVID,

Maître François PIAULT et

Maître Caroline REGNIER AUBERT,

Avocats spécialistes en procédure d’appel, membres de l’association de l’ASPRA France.

L’essentiel

• Plus de renvoi aux dispositions de première instance

• Une définition de l’objet de l’appel

• Une définition des chefs de jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité

• La suppression de la référence à l’indivisibilité du litige

• La possibilité de rectifier la déclaration d’appel par voie de conclusions dans le délai pour conclure

CPC, art. 901

Dispositions applicables aux appels interjetés avant le 1er septembre 2024Dispositions applicables aux appels interjetés à compter du 1er septembre 2024  
Art 901   La déclaration d’appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe, contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l’article 54 et par le cinquième alinéa de l’article 57, et à peine de nullité : 1° La constitution de l’avocat de l’appelant ; 2° L’indication de la décision attaquée ; 3° L’indication de la cour devant laquelle l’appel est porté ; 4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible. Elle est signée par l’avocat constitué. Elle est accompagnée d’une copie de la décision. Elle est remise au greffe et vaut demande d’inscription au rôle.  Art 901   La déclaration d’appel, qui peut comporter le cas échéant une annexe, est faite par un acte contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l’article 54 et par le cinquième alinéa de l’article 57, à peine de nullité :
Pour chacun des appelants :
a) Lorsqu’il s’agit d’une personne physique, ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;
b) Lorsqu’il s’agit d’une personne morale, sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement ;

2° Pour chacun des intimés, l’indication de ses nom, prénoms et domicile s’il s’agit d’une personne physique ou de sa dénomination et de son siège social s’il s’agit d’une personne morale ;
La constitution de l’avocat de l’appelant ;
L’indication de la cour devant laquelle l’appel est porté ;
L’indication de la décision attaquée ;
6° L’objet de l’appel en ce qu’il tend à l’infirmation ou à l’annulation du jugement ;
Les chefs du dispositif du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est, sans préjudice du premier alinéa de l’article 915-2, limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement.   Elle est datée et signée par l’avocat constitué. Elle est accompagnée d’une copie de la décision et sa remise au greffe et vaut demande d’inscription au rôle.  

Le recours à l’annexe – Concernant l’alinéa 1, il est remarqué que l’incise « le cas échéant », instauré par l’article 16 du décret du 25 février 2022, est supprimée.

Pour mémoire, l’arrêté du 25 février 2022 pris en application de ce décret dispose, en son art. 4, que « Lorsqu’un document doit être joint à un acte (d’appel en l’occurrence), ledit acte renvoie expressément à ce document ».

L’avis de la Cour de Cassation rendu postérieurement, le 8 juillet 2022[1], a par ailleurs jugé qu’une déclaration d’appel, à laquelle est jointe une annexe comportant les chefs de décision critiqués, constitue l’acte d’appel au sens de l’art. 901 en sa nouvelle rédaction, même en l’absence d’empêchement technique.

Pour l’heure, aucun arrêté n’a été pris pour modifier l’article 4 de l’arrêté du 25 février 2022.

Aussi, par précaution, il ne faut tirer aucune conclusion hâtive de la suppression de l’incise « le cas échéant ».

En effet, cela ne modifie en rien l’obligation, encore en vigueur, de renvoyer, dans la déclaration d’appel, à l’existence d’une annexe. Rappelons que certaines Cours/certains Conseillers de la mise en état ont une conception rigide, dans la mesure où elles/ils jugent qu’en l’absence de renvoi à une pièce jointe mentionnant les chefs de décision critiqués dans l’acte d’appel, l’effet dévolutif n’opère pas.

Pour l’heure, tant que l’arrêté du 25 février 2022 n’est pas modifié, on évitera l’annexe si le nombre de caractères ne dépasse pas le quota de 8000 caractères. La rédaction choisie « la déclaration d’appel (…) peut comporter une annexe (…) » témoigne d’ailleurs qu’il s’agit davantage d’une faculté autorisée en cas de nécessité (si le nombre de caractères dépasse la limite prévue sur le RPVA) que d’une pratique destinée à se généraliser.

Le contenu de l’acte d’appel – Le nouveau décret offre une nouvelle rédaction des dispositions de l’article 901 plus structurée, nettoyée des renvois et mentions superflues (références aux articles 54 et 57 du code de procédure civile) qui clarifie à l’évidence le contenu de l’acte d’appel.

  • Mentions obligatoires prescrites à peine de nullité Les mentions obligatoires sont toujours prévues à peine de nullité de forme, laquelle doit être soulevée in limine litis et sous réserve de la démonstration d’un grief.

L’on y retrouve les éléments classiques relatifs à l’identification des parties, la constitution d’avocat, l’indication de la Cour d’Appel devant laquelle l’appel est porté et de la décision attaquée, l’objet de l’appel et les chefs de dispositif du jugement expressément critiqués.

  • En ce qui concerne les éléments relatifs à l’identification des parties : ils concernent les appelants mais aussi les intimés. Sur ce point la suppression des renvois aux articles 54 et 57 du CPC permet de corriger une erreur résultant du décret n°2021-1322 du 11 octobre 2021 lequel, en ne renvoyant plus qu’à l’alinéa 5 de l’alinea 5 de l’article 57 (contre l’entier texte auparavant) avait fait « disparaitre » les éléments relatifs à l’identification de l’intimé des mentions obligatoires.
  • En ce qui concerne l’objet de l’appel : L’objet de l’appel est expressément visé à l’article 901 comme constituant une mention obligatoire à peine de nullité. Notons que l’« ancienne » version de l’article 901 renvoyait à l’article 54, 2°, qui visait l’obligation de mentionner « L’objet de la demande » (comprenez, s’agissant de la procédure devant la Cour « L’objet de l’appel », soit au regard de l’article 542, « sa réformation ou son annulation »). Là encore, la nouvelle rédaction de l’article 901 du CPC doit être saluée en ce qu’elle empêche toute erreur d’appréciation du fait des nombreux renvois antérieurs : l’appelant devra préciser selon que son appel tend à l’annulation et/ou l’infirmation. En effet, même si le texte emploie le terme « ou », il nous semble que rien n’interdit à l’appelant de préciser que son appel tend cumulativement à l’un et à l’autre, en demandant à titre principal l’annulation du jugement et à titre subsidiaire à son infirmation, conformément à la solution dégagée par la Cour de Cassation aux termes d’un arrêt rendu le 8 juin 2023.[2]

NB : L’on notera ici que le décret n’a pas modifié l’article 542 du CPC relatif, lui aussi, à l’objet de l’appel qui continue à faire référence à la réformation ou à l’annulation du jugement.

  • La mention dans la déclaration d’appel des chefs du dispositif du jugement critiqués : les dispositions actuelles de l’article 901 du CPC qui renvoient aux chefs de jugement critiqués ne les définissent pas, ce qui a été source d’incertitudes. Seule la circulaire du 4 août 2017 précisait que « la notion de chefs de jugement correspond aux points tranchés dans le dispositif du jugement » (p. 5), définition entérinée par la Cour de Cassation.

Le 7° de l’article 901 du CPC dans sa rédaction issue du décret du 29 décembre 2023 précise que ce sont les chefs visés au dispositif du jugement qui doivent figurer dans la déclaration d’appel, sous réserve du nouvel art. 915-2 du CPC qui permet à l’appelant de compléter, retrancher ou rectifier, dans le dispositif de ses premières conclusions déposées dans son délai pour conclure (906-2 ou 908), les chefs mentionnés dans sa déclaration d’appel.

Sur ce point, une attention particulière devra être observée dans la rédaction du dispositif afin de matérialiser les chefs de jugement complétés, retranchés ou rectifiés par des dispositions particulières.

  • La possibilité de compléter la déclaration d’appel par voie de conclusions Cette possibilité offerte à l’appelant de compléter sa déclaration d’appel par voie de conclusions constitue un assouplissement majeur puisque jusqu’à présent cette rectification passait nécessairement par la régularisation d’une nouvelle déclaration d’appel.

Or si la Cour de Cassation a pu affirmer, que cette nouvelle déclaration d’appel s’incorporait à la première[3], techniquement la régularisation d’une nouvelle déclaration d’appel même rectificative entraîne nécessairement pour le greffe l’ouverture d’un nouveau dossier avec l’attribution d’un nouveau numéro de RG, source de confusion et d’incompréhension mais surtout nécessitant qu’une jonction intervienne, laquelle jonction n’est jamais automatique.

L’essentiel

• L’absence d’une des mentions prévues à l’article 933 n’est jamais susceptible d’entrainer la nullité de l’acte d’appel

•  En l’absence d’indication dans la déclaration d’appel des chefs de dispositif du jugement critiqués la dévolution est réputée s’opérer pour le tout.

Dispositions applicables aux appels interjetés avant le 01 septembre 2024Dispositions applicables aux appels interjetés à compter du 1er septembre 2024  
Art 933   La déclaration comporte les mentions prescrites par les 2° et 3° de l’article 54 et par le troisième alinéa de l’article 57. Elle désigne le jugement dont il est fait appel, précise les chefs du jugement critiqués auquel l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible, et mentionne, le cas échéant, le nom et l’adresse du représentant de l’appelant devant la cour. Elle est accompagnée de la copie de la décision.  Art 933   La déclaration d’appel comporte les mentions suivantes :

1° Pour chacun des appelants :

a) Lorsqu’il s’agit d’une personne physique, ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;

b) Lorsqu’il s’agit d’une personne morale, sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement ;

2° S’il y a lieu, le nom et l’adresse du représentant de l’appelant devant la cour ;

3° Pour chacun des intimés, l’indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle l’appel est formé ou, s’il s’agit d’une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;

4° L’indication de la décision attaquée ;

5° L’objet de l’appel en ce qu’il tend à l’infirmation ou l’annulation du jugement ;

6° Les chefs du dispositif du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité. A défaut, la cour est réputée saisie de l’ensemble des chefs du dispositif du jugement.

La déclaration est datée, signée et accompagnée de la copie de la décision.  

Là encore, la nouvelle rédaction plus structurée, nettoyée des renvois et mentions superflues (références aux articles 54 et 57 du code de procédure civile) clarifie le contenu de l’acte d’appel.

La comparaison avec les dispositions visant la déclaration d’appel dans les procédures avec représentation obligatoire est intéressante.

Les points à retenir sont les suivants :

            –  les mentions ne sont pas prescrites à peine de nullité de la déclaration d’appel ;

            –  l’objet de l’appel est requis (article 933-5°) ;

–  les chefs du dispositif du jugement auxquels l’appel est limité sont également requis    mais il est précisé qu’en l’absence desdits chefs de jugement critiqués, la cour est réputée saisie de l’ensemble des chefs du dispositif du jugement (article 933-6°). La sanction de l’absence de saisine du juge d’appel est donc expressément exclue de la procédure sans représentation obligatoire conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation afin que ne pèse pas sur l’appelant une charge procédurale excessive.

Retrouvez l’actualité de la procédure d’appel sur :

www.asprafrance.fr


[1] Cass. civ. 2ème, avis, 8 juill. 2022, n° 22-70.005

[2] Cass. civ. 2ème, 8 juin 2023, n° 21-22.263

[3] Avis Cour de Cass du 20 décembre 2017 n° 17-70.034, 17-70.036, 17-70.035 ; Civ 2ème du 19 décembre 2020, pourvoi n°19-13.642:

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *